Eneko, ingénieur dans l'agriculture régénérative chez Rize

Est-ce que tu peux nous présenter ton métier et ton entreprise ?

Je travaille pour Rize, une startup du monde agricole qui aide les agriculteurs et agricultrices français·es à mettre en place des changements positifs pour l’écologie. Nous permettons à des exploitant·es en grandes cultures, cultivant des céréales, oléagineux, protéagineux ou légumineuses, de transitionner vers des modes de culture moins impactant pour le climat, la biodiversité et les ressources en eau.
La transition de ces agriculteurs et agricultrices est rendue possible par des financements d’entreprises, qui participent aux projets en échange de certificats garantissant de l’impact positif de leur financement.

Je suis membre de l'équipe scientifique chargée de travailler sur les questions de l’agriculture régénérative. Mon rôle est de mettre en place les méthodes de suivi des impacts des exploitations pour mesurer les effets positifs des changements de pratiques implémentés. Ces méthodes sont mises à jour en continu, en fonction des retours des agriculteurs et agricultrices, et nous travaillons aussi à en créer de nouvelles pour mesurer d’autres impacts écologiques ou pour les adapter à d’autres types d’exploitations agricoles.

Raconte-nous l’histoire de ton déclic, la raison de ton engagement. 

Depuis le lycée, j’ai toujours été concerné par les enjeux environnementaux, mais c’était difficile de savoir où utiliser mes compétences. Comme je faisais une prépa puis une école d’ingénieur, je me suis tourné vers les énergies, mais sans grandes convictions. 

C’est au cours de ma césure en travaillant sur de la permaculture puis de ma dernière année d’école que j’ai décidé de m’impliquer dans l’agriculture. Je me suis toujours senti proche de ces métiers et j’ai eu envie de pouvoir aider les agriculteurs et agricultrices à s’armer face aux difficultés à venir et être moteur de la transition de notre société.

Quels sont les enjeux principaux de ton secteur ? 

Nos aliments et la façon de traiter nos sols sont hyper démonstratifs de l’état de notre société. Et aujourd’hui, on ne peut pas dire qu’on prenne soin de ce qu’on mange ni de comment on le produit.

Remettre l’agriculture au cœur de notre société - une agriculture de qualité - serait une grande victoire et c’est indispensable pour envisager la transition. Stocker du carbone dans nos sols agricoles est essentiel pour réussir notre transition. En effet, nos sols agricoles sont notamment capables de stocker du carbone, c’est un super outil dans la lutte contre le changement climatique.

Mais les enjeux ne sont pas que climatiques, nos sols sont de plus en plus abîmés et de moins en moins vivants. 

Comme le montre le rapport WWF 2020, la production alimentaire actuelle est à l'origine de 70 % de la perte de biodiversité sur Terre.

Enfin, en France, là où l'artificialisation des sols augmente chaque année, il faut permettre aux agriculteurs et agricultrices de sauver leurs terres et d’y protéger la biodiversité et les sols. Pour cela, il faut généraliser un modèle d’agriculture durable et repenser la valeur accordée aux paysan·nes !

Quelles sont les trois compétences les plus utiles pour exercer ton métier ? 

La plus utile, et presque indispensable, c’est avoir une bonne capacité d’analyse. Nous ne sommes pas expert·es de tous les sujets agricoles et de tous les impacts écologiques, et c’est normal. Développer de nouvelles méthodes de quantification de ces impacts demande de savoir trouver, construire et partager de la connaissance.

Le meilleur exemple concerne la biodiversité : nous sommes en train de construire la méthode de mesure associée pour savoir comment les pratiques agricoles affectent la biodiversité. Avant de commencer, je n’y connaissais rien ou presque, tout était à apprendre.

Une deuxième compétence utile est l’adaptabilité. J’ai besoin de prendre en main des tâches et sujets très variés et de passer de l’un à l’autre rapidement. C’est encore plus vrai quand on travaille comme moi dans une startup, une petite structure dans laquelle tout le monde touche à des tâches très différentes.

Enfin, je dirais que l’envie d’apprendre me sert beaucoup. Comme je disais, j’ai parfois besoin de me former de zéro sur une nouvelle problématique. Le fait d’adorer le monde agricole et mon métier aide énormément, c’est un plaisir de m’y plonger.

Dis-nous ton challenge professionnel pour cette année ! 

Mon défi cette année est d’arriver à déployer le suivi des impacts sur la biodiversité et la ressource en eau, sujets complètement nouveaux pour moi sur lesquels je travaille beaucoup.

Les déployer consiste à finir le travail méthodologique en amont, définir les indicateurs à suivre et les implémenter sur notre outil en ligne via lequel les agriculteurs et agricultrices nous font remonter leurs données.

L’objectif est que nos indicateurs soient robustes et de qualité, utiles aux agriculteurs et agricultrices et qu’ils renforcent la confiance des entreprises qui achètent nos crédits carbone.

Quelles ont été les étapes pour trouver ton travail ? 

À la sortie de mes études, je savais que je voulais travailler dans le monde agricole, secteur qui m’intéresse beaucoup et avec lequel j’ai une proximité par ma famille.

J’ai trouvé Rize un peu au hasard, sans vraiment avoir commencé mes recherches. C’est un ami qui m’en a parlé et m’a recommandé de regarder.

En regardant leur site je suis tombé sur une offre, une seule, qui correspondait pile à ce que je cherchais. Bingo !

Le meilleur conseil qu’on ne t’ait jamais donné ?

Ne pas avoir peur de postuler, même quand on ne correspond pas exactement à l’offre. Parfois, surtout dans les petites entreprises et dans les secteurs de la transition écologique, on peut se retenir de candidater à une offre qui nous paraît taillée sur mesure.

Mais en fait pas du tout, et encore plus dans ces environnements où ce qui compte beaucoup c’est la motivation que tu as pour le projet ! Tu pourras apprendre ce qu’il te manque sur le tas.

C’est ce qui s’est passé pour moi, Rize cherchait initialement un ingénieur agronome, ce que je ne suis pas. En rencontrant quand même l’équipe, j'ai pu montrer ma motivation et mon envie d’apprendre, ça a fonctionné.

Une ressource à nous partager qui t’a marqué ces derniers temps ? 

Un livre que j’ai découvert récemment : Hydratez la terre d’Ananda Fitzsimmons. Une piqûre de rappel essentielle sur le rôle oublié de l’eau dans la crise climatique. Le livre rappelle à quel point il est important d’agir sur le cycle de l’eau et d’inverser la tendance actuelle de perturbation, qui a de gros impacts sur notre sécurité alimentaire et sur la tendance climatique.

La maison d’édition, La Butineuse, regorge d’autres essais passionnants sur l’agriculture, l’énergie, le climat. De belles idées à cultiver sans modération (et sans pesticides).

Envie de poser d’autres questions à Eneko sur son métier ? Écrivez-lui ici !

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